Le musée National de la Préhistoire aux Eyzies en Périgord
Le Musée National de Préhistoire est issu de la rencontre toute symbolique d’un jeune instituteur, Denis Peyrony (nommé aux Eyzies de Tayac en 1891), promis à un brillant avenir de pré-historien, et d’un château ruiné, encore majestueux, enchâssé dans une falaise riche d’un passé plusieurs fois millénaire d’occupation humaine.
Près d’un demi-siècle après les premières fouilles dans la région, la science préhistorique acquiert ses lettres de noblesse avec les travaux de Lartet et Christy entre 1863 et 1864 dans la vallée de la Vézère. Fin 19ème, diverses polémiques scientifiques s’alimentent aux feux rougeoyants de batailles mémorables -attribution de l’art pariétal, existence des pratiques funéraires, droit à l’expression symbolique de nos ancêtres toutes menées par d’éminents archéologues majoritairement parisiens voire étrangers.
Fort de belles découvertes, Peyrony est bientôt recruté par le ministère des Beaux-Arts. Ses nouvelles fonctions lui donnent les moyens de tracer les grandes lignes d’une nouvelle politique patrimoniale:
- – assurer la protection des sites archéologiques grâce à l’application de la loi de 1913 sur les monuments historiques.
- – commencer la restauration du château des Eyzies, futur musée, pour enrayer l’hémorragie des collections archéologiques, en les conservant et les présentant sur place.
- – engager le village, et au-dela la vallée de la Vézère, sur la voie du tourisme culturel, par l’ouverture au public, dès 1920, des grottes ornées : Font-de-Gaume et bientôt Combarelles.
Interrompu par la grande guerre, l’aménagement du musée « régional » de préhistoire, franchit diverses tapes : l’inaugura-tion officielle a lieu en 1923, bientôt complétée par l’érection, de la statue symbolique, l’homme de Néandertal par Paul Dardé en 1931. Poursuivant l’œuvre de son père, à partir de 1936 et pour trente années, Elie Peyrony doit répondre aux exigences d’une mutation difficile. Le développement accéléré du tourisme drai-nant une fréquentation de masse, non plus seulement réservée aux amateurs ou spécialistes de préhistoire, et « l’effet Lascaux » (découvert en 1940 il est vrai) auraient dû générer une nouvelle muséographie… Mais l’effort, également justifié, se porta plutôt vers l’accueil des chercheurs que les séries des sites éponymes attiraient d’autant plus que la préhistoire et l’anthropologie étaient désormais enseignées à l’université et le règlement du problème du stockage de plusieurs centaines de milliers d’objets dans des réserves correctes. Il en résulta l’extension Froidevaux, c’est-à-dire la construction en 1966-67 de deux bâtiments en bout de terrasse, à flanc de falaise, l’un servant de réserve, l’autre de laboratoire et de salle de travail des chercheurs, alors qu’un nouveau local d’accueil était bâti, empiétant quelque peu sur l’ancienne douve du château. Comme on l’aura deviné, la priorité accordée à cette « orientation recherche » tenait pour beaucoup à son rattachement administra-tif à la Direction Régionale des Antiquités Préhistoriques d’Aquitaine, service de l’Etat à mission strictement scientifique.
L’action entreprise était de toute façon nécessaire. De son côté, le grand public, dont la sensibilisation au patrimoine et à sa fragilité s’était considérablement accrue depuis la fermeture de Lascaux en 1963, trouverait bientôt son compte avec la réorganisation totale du musée.